Potager de Villandry © Myrabella, Wikimedia Commons

Mes premiers souvenirs de jardin sont ceux d’un potager, celui de mes grands-parents. Je repense à mes premiers semis de radis – immangeables du reste – ou à la dégustation en cachette d’un pois sucré ou d’une belle framboise. Dire que ma grand-mère pensait que c’étaient les oiseaux qui avaient amenuisé la récolte de l’année…

En tant que jardinier, c’est aussi le premier jardin que j’ai recommencé à faire, motivé par l’envie de cultiver mes propres légumes, de variétés anciennes, selon un mode de culture biologique. Sans oublier le côté thérapeutique d’une telle activité, en complément de mon travail de doctorat plutôt abstrait.

Malgré tout le plaisir que j’associe au potager, en tant que concepteur de jardin, je déconseille à la plupart des mes clients de prévoir un tel aménagement. Je n’en connais pas qui soit plus chronophage en terme d’entretien. Si l’on ne peut s’en occuper soi-même, on produit rapidement les salades les plus chères du monde. En effet, le potager est un éternel recommencement, il faut biner, désherber, semer toujours avec une longueur d’avance, contrôler une invasion de limaces… Bref une attention de tous les instants.

Je propose en revanche la réalisation de « faux potagers ». Ceux-ci reprennent notamment l’ordonnancement régulier en lignes du potager, ce qui évoque ce dernier. Ici pourtant,  les espèces qui y prennent place n’ont rien à voir avec les traditionnelles carottes ou salades. D’une part, je privilégie les légumes et petit fruits pérennes, qui offriront chaque année leur récolte : cassis, groseilliers, framboisiers, mais aussi cardons, artichauts, asperges (vertes pour éviter de devoir les buter) ou crambes maritimes. Moins connu mais très populaire en Angleterre, on déguste les jeunes pousses de cette dernière, à la manière des asperges, après avoir recouvert le pied d’un grand pot pour le blanchir en début d’année.

D’autre part, je substitue également une grande partie des légumes par des fleurs, créant ainsi un bouquetier qui permet de fleurir la maison tout au long de l’année sans pour autant devoir dégarnir les massifs du jardin. A nouveau on retrouve les alignements d’une même espèce dont le choix est presque infini. On peut envisager des annuelles faciles, comme Centaurea cyanus ou Amni majus, des bulbes un peu trop baroques pour s’intégrer au reste du jardin mais qui seront splendides en bouquet, comme les tulipes perroquets. Je privilégie cependant des vivaces robustes, caractéristiques des jardins paysans, comme Paeonia lactiflora. Je trouve que c’est également l’emplacement idéal pour de nombreux arbustes à floraison printanière qui n’offre que peu d’intérêt le reste de l’année, comme le forsythia, le lilas, le philadelphus ou le weigelia. Dans ce cas, on contrôlera leur développement par une taille sévère qui favorisera la production de pousses bien droites portant des fleurs à leur extrémité, idéales pour la réalisation de bouquets. Cette opération se fera juste après la floraison.

Dernier conseil, pour limiter grandement le travail de désherbage et de binage, il est impératif de recouvrir le moindre espace de terre nue qui est une invitation pour les « mauvaises herbes » à venir s’installer, que ce soit à l’aide de couvre-sol sous les arbustes ou de paillis. Pour que le jardin reste un plaisir…