Feuilles de Quercus robur ‘Concordia’ © Zkrzakov, Wikimedia Commons

J’ai longtemps détesté le jaune. Cela tient peut-être à un traumatisme de l’enfance. Il y a dû y avoir une mode à la génération de mes parents qui voulait que l’on repeigne une pièce voir sa maison entière en jaune, de préférence canari, de la moquette aux placards de la cuisine. Et mes discussion avec d’autres jardiniers me confirmaient ce point de vue : le jaune est une couleur jugée trop criarde, difficile à intégrer dans des plantations.

J’ai radicalement changé d’opinion depuis mon passage chez Louis Benech qui m’a ouvert les yeux sur les possibilités de cette couleur. Une des meilleures façons de l’utiliser, c’est en total look, ne faire qu’un jardin de fleurs jaunes : un jardin du soleil, un jardin doré… Déjà Gertrude Jekyll recommandait une telle combinaison dans son livre Color scheme for the flower garden. La raison de ce succès est simple. Autant je trouve difficile d’obtenir une combinaison réussie de roses, certains tirant plus sur le bleus, d’autres sur le rouge, autant je trouve qu’un camaïeu de jaune est toujours réussi. Le jaune s’harmonise très bien avec des fleurs blanches et quelques touches de noir pour apporter une note de contraste bienvenue. En plus, le choix de fleurs est vastes et on en trouvera forcément certaines adaptées aux conditions du lieu. Les plus timides pourront aussi opter pour des teintes claires de jaune primevère, comme chez le Cephalaria alpina.

Moins connu, le jaune se retrouve aussi sur certains feuillages. Il peut s’agir d’une panachure jaune de la feuille, comme celle de Hedera helix ‘Buttecup’ ou d’Ilex x altaclerensis ‘Golden King’. Dans d’autres cas, c’est carrément toute la feuille qui prend une jolie teinte dorée chez certains cultivars. L’intensité de la couleur jaune dépend de l’exposition, plus la plante est au soleil et plus le jaune est intense. A l’ombre, il tirera plus sur un chartreux. Attention cependant, le feuillage jaune a tendance à brûler, mieux vaut donc éviter les endroits les plus chauds. La liste des cultivars est longue, quelques exemples cependant : on retrouve aussi bien des arbres comme Gledistia triacanthos ‘Sunburst’, Tilia x europaea ‘Wratislaviensis’, Quercus robur ‘Concordia’, Fagus sylvatica ‘Aurea Pendula’, des arbustes comme Philadelphus coronarius ‘Aureus’ et Sambucus racemosa ‘Sutherland Gold’ ou des vivaces Humulus lupulus ‘Aureus’, Carex brunnea ‘Jenneke’ et Campanula garganica ‘Dickson’s Gold’. Facile à reconnaître, ces cultivars contiennent souvent le mot Aurea ou Gold dans leur nom. Ces plantes combinées entre elles sont idéales pour illuminer un coin plus sombre du jardin ou dans une cour. Je trouve que c’est une alternative plus originale au feuillage vert foncé et aux fleurs blanches traditionnellement employés dans ces endroits. De plus, à la différence du feuillage argenté qui a l’air maussade par mauvais temps, le feuillage doré a toujours l’air frais et gai.

On peut encore imaginer des combinaisons plus audacieuses auxquelles je l’avoue il faut prendre goût. Le mélange de feuillage doré et de fleur rouge et rose vif par exemple. Cette combinaison a été utilisée par le Prince Charles lui-même dans son jardin à Highgrove, l’inspiration lui étant venu de textiles tibétains. On le retrouve aussi sur certaines plantes déjà, comme le Weigelia florida ‘Rubidor’, le Dicentra spectabilis ‘Gold Heart’ ou le Fuchsia ‘Genii’. La nature reste toujours l’une des plus belles sources d’inspiration pour les mélanges de couleurs.